Une conséquence directe de la Guerre :
Le BILOM .
En 1948 en France ,la volonté politique manque au sujet de la guerre d’Indochine , la reconquête piétine , et devient de plus en plus exigeante en hommes et en matériel , alors que la France , ruinée ,est à reconstruire , et est en proie à de nombreux conflits sociaux . Le parti communiste et une grande partie de « l’intelligentsia « luttent ouvertement contre la « sale guerre d’Indochine « .
Le corps expéditionnaire est exclusivement composé de militaires d’active et de volontaires , et ceux qui sont partis les premiers aspirent au retour , la nécessité d’une relève est évidente , mais les engagements se font rares pour des français préoccupés par les difficultés du quotidien .
En 1948, le ministre de la défense , pense aux quelques milliers de jeunes qui croupissent dans les prisons : ceux qui ont fait le mauvais choix au cours des années de guerre , volontaires du front de l’est , engagés de la collaboration ayant échappé à l’épuration sauvage de 1945, mais condamnés souvent à de lourdes peines . On pense que certains de ces hommes ont déjà suffisamment payé , qu’on peut leur offrir une possibilité de rachat , mais que de toute façon , il vaut mieux faire tuer ces gens là plutôt que d’autres jeunes français .
Le 27 mai , André Marie , ministre de la justice envoie une circulaire à l’administration pénitentiaire pour connaître le nombre de détenus susceptibles de partir pour l’Indochine ; cela provoque divers réaction : certains se refusent à servir une république alliée des soviets , d’autres au contraire souhaitent reprendre le combat contre l’idéologie exécrée , mais pour la plupart , ils souhaitent prouver leur patriotisme ou tout simplement sortir de prison , et près de 4000 volontaires se font inscrire , en sachant que la durée de l’engagement ( trois , quatre ou cinq ans ) sera fonction de la durée de la peine restant à subir . Les condamnés a plus de quinze ans , et ceux atteins par la limite d’age de quarante ans ne peuvent s’inscrire .
Le Général Revers ,envisage la création d’une demi brigade à trois bataillons , soit 2500 hommes qui constitueraient un renfort immédiat appréciable pour l’Indochine, mais afin de ne pas provoquer l’opinion , et surtout le parti communiste , il décide de procéder par étapes : il crée le BILOM ( Bataillon d’Infanterie Légère d’Outre Mer ) à effectif de 708 hommes encadrés par 23 officiers et 109 sous officiers prélevés dans l’Infanterie Coloniale , il prescrit la mise sur pied à Fréjus , et le 1° août , sont formées deux compagnie de combat et un petit état major . La note de création précise que les hommes ont un mois pour signer leur engagement .
Le Chef de Bataillon Clausse est nommé pour prendre la tête du BILOM , le Capitaine Tap , prend la tête de la 1° Compagnie , et réussissent à rassembler 811 signatures .
Le premier détachement devrait partir à partir du 1°novembre , mais l’administration pénitentiaire , et la commission des grâces procèdent avec une lenteur qui confine à la mauvaise volonté : le premier détachement qui vient de Struthof comprenant 43 volontaires ne parvient à Fréjus que le 21 octobre, le second de 70 hommes le 15 novembre , puis 80 fin novembre …. Et c’est ainsi que la constitution prend plusieurs mois de retard .
Le Capitaine Tap prend en charge la formation et l’entraînement de la première compagnie . .
Le BILOM n’a ni drapeau , ni insigne , aucune permission n’est accordée , et l’avenir des hommes et conditionné , sans qu’aucune promesse ne leur soit faite , par leur conduite au combat , ce qui n’est pas sans rappeler les « Bat d’Af » ou « Joyeux « qui eux étaient constitués par des condamnés de droit commun ..
La première compagnie embarque à bord du Pasteur le 1° décembre 1948 , la deuxième compagnie ,en gestation , mais guère avancée , et l’idée de Demi Brigade est abandonnée , et le bataillon fortement compromis . L’embarquement est perturbé comme de bien entendu par des manifestants du PC et de la CGT ..
A leur arrivée a Saigon , le Général Alessandri confirme aux volontaires qu’il ne sont plus autre chose que des soldats français .. « Battez vous bien , cela seul compte « et affecte la compagnie au Cambodge , qui garde son appellation de 1°BILOM .Elle participe à la sécurité du secteur de Kompong Trach : opération de nettoyage , protection des convois , et à de nombreux combats sporadique ; c’est au cours de l’un deux qu’il subit ses première perte : le Sous lieutenant Parisot de Bernecourt est tué, ainsi que le sergent Baratte , plusieurs hommes sont blessés .
La compagnie Tap parfaitement rodée et opérationnelle , est affectée en mars dans le Sud Annam et s’installe à Ba Ngoi , dans le secteur de Nha Trang , elle tient plusieurs petits postes isolés , et forme l’encadrement de volontaires partisans Mois , elle participe a de nombreux combats contre les Viets .
La deuxième compagnie , formée à Frejus , embarque le 6 avril , et rejoint Ba Ngoi le 20 juin , où a lieu une prise d’arme rassemblant le BILOM , et ou sont remises les premières Croix de Guerre TOE au Lt Ritzinger, au sergent Chretien et à une dizaine d’hommes .
Le 29 juillet 1949, le BILOM est dissous , et à partir de ses unités , il est créé deux « Compagnie de Marche du Sud Annam aux ordres du capitaine Tap a Ba Ngoi, et du capitaine Bégué à Khan Hoa . Au bout de six mois , la preuve est faite que les volontaires du BILOM sont des soldats français à part entière , reconnus aptes à servir dans n’importe quel emploi ,mais cela ne modifie pas leur statut juridique , toujours incertain , il n’est toujours pas question d’amnistie , ni de réhabilitation , mais le capitaine Tap prend sur lui de nommer des caporaux , promotion interdite par les statuts du BILOM .
Des mutations sont alors effectuées par les autorités qui savent disposer avec le Bilom d’un réservoir d’homme compétents et d’un inépuisable dévouement , et c’est ainsi que l’on retrouvera des hommes dans tout le sud Annam et sur le plateau Moi , dans les unités montagnardes , pauvres en personnel et matériel , encadrant des tirailleurs locaux , tenant des postes perdus en brousse , nombre de ces volontaires y laisseront leur vie , ou y seront blessés , mais aucun ne désertera ou ne sera accusé de lâcheté au combat , même s’ils n’ont pas eu la gloire qu’ils espéraient .
En Octobre 1950 , plusieurs d’entre eux ont été nommés sous officiers pour leur compétence et leur conduite exemplaire , or ils sont toujours sous le coup des condamnations , le lieutenant Ritzinger alerte les autorités mais sa démarche reste vaine , il es tué le 10 mars 1951 dans un coin perdu des plateaux Mois ( Plei Djama ) , et comme si sa mort avait réveillé quelques consciences , des décisions de réhabilitation interviennent , mais sans cohérence , des dossiers sont rejetés , et d’autres pour lesquels rien n’avait été demandé parviennent aux intéressés par des cheminements aléatoires . Certains sont revenus à la vie civile sans rien demander , toujours sous le coup de leur condamnation , d’autres ont combattus en Algérie , certains y sont morts , d’autres sont restés dans l’armée …..
Aujourd’hui , il ne reste de leur aventure qu’une plaque sur un mur a Fréjus , elle porte les noms des morts du BILOM ..
Source : Raymond Muelle . Le Bataillon des Réprouvés . Historama
Spécial Inochine 1994
Une petite pensée pour eux , et une gerbe à Frejus en signe de reconnaissance ...